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Grande muraille a Mutianyu

 
Le week-end dernier, nous sommes partis camper sur la Grande Muraille de Chine... Expérience pour le moins inoubliable, mais figurez-vous, pas si insolite que ça. D'ailleurs, nous n'étions pas seuls...
 
L'événementiel "Grande Muraille" est chose courante à Pékin, par exemple, la boite de Laurent y organise tous les ans un "wine diner"... Et pour la clôture de l'Année de la France en Chine, il y a eu un pique-nique géant sur la Grande Muraille.
 
Pour nos amis "pékinois" (comprenez expatriés de Pékin), randonner sur la muraille le week-end et en découvrir un tronçon différent à chaque fois est assez habituel. C'était quand même leur première expérience de camping...
 
Pour nous, il faut bien le dire, ce fut quelque chose de peu ordinaire.
 
D'abord il fallait aller à Pékin. Ce n'est pas la porte à côté, mais c'est bizarrement une des destinations de Chine les plus facilement accessibles pour le week-end (hors les environs immédiats de Shanghai). En avion, il y a de nombreux vols (environ un toutes les 30 minutes) et beaucoup moins chers que pour d'autres villes de Chine. Et surtout il y a le train-couchettes "express", qui met 12h quand il en faut 25 pour aller à Canton (à peu près la même distance). Cinq trains quittent Shanghai tous les soirs entre 19h et 19h30 et arrivent à Pékin exactement 12h plus tard. En "couchettes molles" (1ère classe), c'est vraiment très confortable, on y dort très bien sous sa petite couette, et on peut donc aller passer deux jours à Pékin sans fatigue excessive en faisant l'aller-retour en train. Très pratique (et d'ailleurs la solution que nous recommandons à tous nos visiteurs).
 
Ensuite, ce fut pour nous l'occasion de découvrir une autre facette de la Grande Muraille. C'est notre troisième rencontre avec elle, et le spectacle est toujours aussi magique. Contrairement à une légende assez répandue, elle n'est pas visible de la Lune (franchement, la couleur de la muraille se fond tellement dans le paysage environnant qu'il doit être difficile de l'apercevoir même d’avion), mais c'est sans aucun doute une des constructions humaines les plus grandioses et impressionnantes qu'il nous ait été donné de voir (même si nous sommes loin, très loin, d'avoir tout vu). Dans notre Panthéon personnel, et à la date d'aujourd'hui, elle vient en tête avec la Cité Interdite et le Taj Mahal.
 

Lever du soleil sur la Grande Muraille de Chine

 
On dit habituellement "la" Grande Muraille, mais en fait il existe de nombreux tronçons plus ou moins accessibles (n'oublions pas que la chose fait plus de 4000 km de long), d'Est en Ouest. On peut même en voir des vestiges très délabrés dans le Xinjiang ou le Gansu, très à l'ouest de Pékin, sur l'antique route de la soie. Et elle court à l'est jusqu'à la mer. Parmi les tronçons les plus célèbres, Badaling, situé tout près de Pékin, est celui que nous avions vu lors de notre voyage de noces, très restauré et très transformé en Disneyland (bof). Il y en a bien d'autres, parmi lesquels Jinshanling, près de Chengde (au nord-est de Pékin) où nous sommes allés l'hiver dernier. Nous étions seuls sur la Grande Muraille par -15 degrés et sous la neige, donc la magie était vraiment intacte, mais l'endroit est également assez restauré et tout semble prévu pour accueillir les masses de touristes.
 
Cette fois, nous sommes allés sur un tronçon peu connu des touristes de passage, mais bien connu des Pékinois (il y avait du monde pour la rando dimanche) ; là, la Muraille est beaucoup plus sauvage, pas du tout restaurée, envahie de végétation et serpente dans un paysage très accidenté. En contrepartie, elle est aussi plus dangereuse, pas du tout sécurisée, et certains passages sont franchement vertigineux, pour ne pas dire carrément périlleux, surtout si on est un peu sujet au vertige (ce qui est malheureusement mon cas).
 
De toute façon, nous ne pouvions guère nous aventurer sur ces passages à pic, étant très chargés. En effet, côté logistique, ce week-end c'était un peu l'expédition au pôle nord ! Il commence à faire bien froid à Pékin (0-5 degrés la nuit) et il fallait être bien équipés pour passer la nuit dehors, surtout avec le vent glacial.
 
Comme il n’y a pas Décathlon à Pékin, nous avons fait le trajet depuis Shanghai avec des renforts de sacs de couchage… A l’arrivée, il fallait fignoler l’organisation, terminer les courses, préparer un gâteau au chocolat, faire les sacs…
Je vous vois lever le sourcil à l’évocation du gâteau au chocolat. Précisons d’abord que le prétexte tout trouvé pour cette aventure était l’anniversaire de notre ami Alexis qui habite à Pékin. Il fallait donc un gâteau d’anniversaire. Pour tout dire, ce fut un week-end d’agapes et on ne s’est pas trop embarrassé de considérations de poids ou d’encombrement lors de la composition du menu – d’où le fait que nous sommes partis chargés comme des baudets – en plus des tentes, sacs de couchages, tapis de sol, réchauds, casseroles, thermos de chocolat, de thé et de café,… Ne pouvant donc marcher, nous avons passé la majeure partie du temps à consommer nos nombreuses provisions solides et liquides (n’ai-je pas oublié de mentionner le vin et le champagne ?)
 

Camping sur la Grande Muraille

 
Vers 15h30 samedi, nous voilà en route, un petit groupe de 6 fort sympathique. Après deux petites heures de route, nous voilà au pied de la montagne. La nuit commence à tomber, ça tombe bien car il s’agit de passer inaperçu aux yeux des gardiens du temple… enfin, de la muraille. Car le camping est officiellement interdit en Chine. Vous me direz qu’il est illusoire de vouloir passer inaperçus avec des énormes sacs pleins de matelas qui dépassent et de casseroles qui brinquebalent, mais bon, on y croit. Le gars (un petit vieux à l’air tout gentil) ne dit rien et nous voilà partis. Le chauffeur d’Alexis, lui, repart avec la voiture, emmenant ainsi avec lui notre seule solution de repli. Heureusement, après une journée de brouillard, le ciel semble se dégager et on aperçoit les premières étoiles.
En route ! Il faut d’abord grimper une bonne demi-heure avant d’atteindre la Grande Muraille. Heureusement la nuit n’est pas trop noire, car nous avons pratiquement oublié les lampes de poches (on en a 2 pour 6, et pas de piles de rechange…). Arrivés sur le mur, nous nous mettons en quête d’un endroit pour camper.
Soudain, l’horreur ! Des aboiements retentissent, des lueurs surgissent dans la nuit. Nous envisageons aussitôt le pire : ces messieurs d’en bas nous ont suivis et vont nous obliger à redescendre. Panique à bord. Nous éteignons vite les lampes, et tels des hors-la-loi fuyant par les forces de l’ordre, nous nous précipitons dans la direction opposée. Grimpons dans le noir complet un escalier des plus raides (impression confirmée le lendemain matin). Un peu plus loin, nous nous entassons derrière un pan de mur et attendons dans le silence le plus complet que nos poursuivants nous dépassent (à ce stade, on avait complètement oublié le chien…).
Finalement, comme rien ne se passe à part un froid de plus en plus pénétrant, nous nous décidons à nous installer. On monte les tentes, on dîne (froid car on a trop la flemme d’allumer le réchaud) en regardant le magnifique plafond étoilé, on ouvre le champagne. Et on se couche un peu frigorifié en empilant les couches. Nuit fraîche, mais calme.
Et à l’aube, le réveil, avec un magnifique lever de soleil dans un ciel d’un bleu transparent, et la Grande Muraille qui moutonne à l’infini sur les reliefs escarpés.
 
Oui, mais, nos poursuivants, alors ? Au réveil, on s’aperçut que ce n’était que d’autres campeurs, qui n’avaient pas bougé d’un pouce depuis le moment où on avait aperçu leurs lampes pour la première fois…
 
Pour la journée du dimanche, les photos seront éloquentes : petit-déjeuner sous un soleil magnifique. On marche un peu, pas beaucoup (mais assez pour attraper quelques petites courbatures dans les cuisses avec ces marches au format démesuré) ; déjeuner au soleil (cette fois, on sort le réchaud et on met les petits plats dans les grands) ; encore un peu de marche avant de rejoindre la voiture, puis Pékin et son aéroport, et Shanghai.
 

Camping sur la Grande Muraille

 
Voilà la chronique d’un week-end « ordinaire » en Chine (bon, c’est vrai, j’exagère, ce n’est pas si ordinaire que ça. D’ailleurs, mes collègues ont du mal à s’en remettre, ils me prennent tous pour une folle…).
  
Revenons au quotidien puisqu’il le faut bien… Entre deux week-ends, nous poursuivons nos observations de la vie chinoise en milieu professionnel, et il faut bien constater que les petites histoires de bureau sont les mêmes en Chine qu'en France…
 
Il y a quand même quelques nuances, par exemple la « punishment policy » (ou politique du bâton). Dans ma boite, j’ai rien constaté de tel, mais on sait que ça existe, notamment chez Laurent. Par exemple, si la standardiste commet une erreur, elle a une amende de 300 RMB (soit 30 euros) – sur son salaire qui doit faire 3000 à tout casser. Pareil si le boss a décidé de faire une réunion le matin à 9h, et qu’on est en retard, ou qu’on sèche…
Eh oui, imaginez la tête de nos bons vieux syndicats... Le paradis communiste, ce n'est pas en Chine ! D'ailleurs, ici, on se gausse bien de nos grèves récurrentes... Le droit de grève ? Connais pas…
 
Ceci dit, d'une manière générale, les Français souffrent d'une réputation absolument déplorable sur le plan professionnel - toujours en vacances ou en grève, pas sérieux, ne pensant qu'à leurs 35 heures et ne répondant pas aux mails... Etant bien placée pour comparer des choses comparables, je peux dire que cette réputation est largement usurpée et qu'à niveau d'expérience égal mes collègues en France étaient bien plus efficaces et bien plus pro que mes collègues chinois. Non que mes collègues chinois ne connaissent pas leur métier, loin de là. Sur le plan technique ils sont irréprochables. Mais en termes d'organisation, de respect des délais, de finition dans les détails, etc... il reste encore du chemin à parcourir.
Malgré tout, notre image à l'étranger (pas seulement auprès des Chinois, mais auprès de tous les autres - surtout les Anglo-Saxons bien entendu), au delà des images d'Epinal sur la culture, la gastronomie, le vin, le luxe et la langue (le français est une langue qui a le vent en poupe), est malheureusement assez lamentable.
 
Allez, hauts les cœurs !
 

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Tag(s) : #Carnets de Chine